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Les masques en pagne, une solution efficace pour lutter contre le covid-19

Le président du Rassemblement des jeunes patriotes gabonais (RJPG), Gaël Koumba Ayoune, communément appelé le général du Mapane (quartiers sous intégrés) dans une lettre adressée au chef de l’Etat Ali Bongo Ondimba et dont africdirect a obtenu copie ce jeudi, interpelles le gouvernement sur le port systématique du masque, notamment en pagne, pour lutter efficacement contre la propagation du Coronavirus au Gabon.  Africdirect vous publie intégralement la lettre.

 

Lettre ouverte au gouvernement

En tant que leader du Mapane, dont le combat est axé sur l’amélioration des conditions de vie de ses habitants, j’écris cette lettre pour apporter ma modeste contribution à l’effort du gouvernement dans la lutte contre la propagation du Covid-19.

Comme tous les gabonais, je me prépare et je redoute la menace de la pandémie de Covid-19 qui plane au-dessus de notre pays, le Gabon. Je la redoute encore plus en pensant à cette majorité de la population qui vit dans les quartiers sous-intégrés et qui ne saura faire face à la crise sans moyens financiers. Je me suis investi depuis plusieurs semaines dans la sensibilisation, d’abord sur le terrain, puis sur les réseaux sociaux.

Le gouvernement gabonais a réagi très vite avec la mise en place de gestes barrières et de distanciation, mais aussi de multiples mesures visant à protéger nos frontières, à rechercher et isoler toutes les personnes potentiellement infectées et à limiter les déplacements de la population, donc la circulation du virus.

Bien que reconnaissant que rester chez soi est une mesure prioritaire, qui doit être strictement mise en application par nos concitoyens, suivant les instructions édictées par le gouvernement, il est néanmoins des déplacements essentiels, notamment pour s’approvisionner en nourriture, en eau, pour les professions indispensables à la vie de la nation et tous ceux qui assurent les services minima dans les administrations.

Les gestes barrières sont indispensables pour éviter la propagation du virus. Même si aucune des mesures barrières n’est efficace à 100%, c’est la combinaison de toutes les mesures barrières qui réduit considérablement les risques de propagation du virus. A côté de l’hygiène stricte et de la distanciation sociale, il est une mesure simple qui a malheureusement été négligée dans les recommandations énoncées par la plupart des pays : le port généralisé du masque facial.

Le virus ne se propage pas seulement quand une personne tousse ou éternue, mais aussi quand elle parle. Nous émettons alors des mini-gouttelettes invisibles, qui transportent le virus et peuvent atteindre une autre personne ou se déposer sur des objets. Il est certes primordial de nettoyer les surfaces souillées et de se laver les mains régulièrement, mais il est au moins aussi important de bloquer autant que possible la dispersion du virus à la source, en se protégeant le nez et la bouche.

Les publications scientifiques se multiplient et s’accordent désormais à dire qu’au moins 1 personne sur 3 est un porteur asymptomatique, c’est-à-dire propage le virus sans savoir qu’elle est infectée. Tout aussi alarmant, les deux autres tiers des personnes infectées sont contagieux avant de présenter des symptômes. C’est la période d’incubation qui, rappelons-le, peut durer jusqu’à 14 jours. Chacun d’entre nous peut se demander combien de personnes il a côtoyé pendant les 14 derniers jours, pour avoir une idée de la vitesse de propagation du virus. Le Gabon n’est pas encore sorti d’affaire. Le virus peut circuler silencieusement pendant des semaines. C’est la situation à laquelle ont été confrontés tous les pays dont le nombre de cas explose actuellement.

C’est pendant la phase de circulation silencieuse du virus qu’il faut agir très vite et de façon solidaire. Le port généralisé du masque facial anti-projection, qu’il soit chirurgical, de chantier ou en tissu, permet d’éviter que les porteurs asymptomatiques ou en phase d’incubation propagent le virus à leur entourage et le répandent dans leur environnement. C’est une mesure simple pour appuyer tous les efforts déployés par le gouvernement. Porter un masque est un acte citoyen pour protéger les autres. Si chacun protège les autres, tout le monde est protégé. Ne négligeons aucun effort pour protéger nos concitoyens et notre beau pays. Les petits efforts de chacun feront une grande différence.

Je salue la clairvoyance du gouvernement gabonais qui est l’un des rares à avoir encouragé immédiatement le port du masque facial au-delà des malades et des soignants, notamment pour les professions au contact de la population (taximen, commerçants alimentaires… etc.). Néanmoins, nous pouvons et nous devons aller encore plus loin en généralisant le port du masque. Chacun de nous doit prendre conscience qu’il peut porter le virus sans le savoir. Un client postillonne dans le taxi et le client suivant est contaminé.

Devant la menace imminente qui pèse sur notre pays, il est l’heure d’être pragmatique. Le gouvernement gabonais, malgré tous ces efforts, ne pourra pas fournir assez de masques chirurgicaux pour tous les gabonais, à raison d’un masque toutes les 3 heures. En témoigne le nombre de policiers qui effectuent des contrôles sur la voie publique sans masque, les taximen qui portent le même masque jetable plusieurs jours de suite au point qu’il devient noir et surtout totalement inefficace. Ce sont autant de comportements à risque qui constituent un danger pour nous tous.

Aujourd’hui, il y a une pénurie mondiale de masques FFP2 et chirurgicaux qui doivent donc être réservés en priorité au personnel soignant. L’heure n’est plus aux débats pour savoir quel masque est le plus efficace dans une situation idéale. Les masques en tissu, lavables et faciles à réaliser à la maison constituent une solution immédiate. Ils ne servent pas à se protéger soi-même à 100%, mais ont démontré scientifiquement leur efficacité à réduire la transmission des virus. Le port de ces masques par l’ensemble de la population peut ainsi réduire considérablement la circulation du virus.

Les appels à un port généralisé du masque provenant d’experts virologistes, médecins, infectiologues se multiplient dans le monde entier. Parmi d’autres experts, le professeur KK Cheng, directeur de l’institut de recherche en santé appliquée de l’université de Birmingham, Royaume Uni, communique activement sur son compte twitter sur la nécessité de porter des masques en tissu pour faire face à la pénurie de masques actuelle. George Gao, directeur général du Centre chinois de contrôle et de prévention des maladies (China CDC), membre de l’équipe qui a isolé le virus responsable du Covid-19 en janvier 2020 et co-auteur de plusieurs publications scientifiques sur ce sujet, s’est exprimé à propos des masques dans une interview publiée le 27 mars dernier dans la revue Science. Selon lui, « la plus grande erreur de l’Europe et des Etats-Unis est de ne pas avoir généralisé le port du masque ».

Le port du masque est répandu et fortement encouragé dans de nombreux pays asiatiques. Plusieurs pays ont déjà rendu le port du masque obligatoire pour tous. Hong Kong, malgré sa proximité avec la Chine et une population de plus de 7 millions d’habitants, ne déplore à ce jour que quatre morts. En République Tchèque, où le port généralisé du masque a été décrété le 18 mars 2020, le premier ministre est apparu en public avec un masque fait maison en tissu pour montrer l’exemple. Le 30 mars, l’Autriche a également rendu le port du masque obligatoire pour les clients dans les supermarchés, suivie par la Slovénie.

Dans son discours du 30 mars 2020, le président des Etats-Unis a annoncé que le port du masque par tous les américains était envisagé, conformément à une feuille de route proposée par l’ancien commissaire de l’Administration américaine des denrées alimentaires et des médicaments (FDA), Scott Gottlieb. Afin de ralentir la propagation de l’épidémie, ce rapport préconise vivement le port systématique de « masques faciaux non médicaux en tissu en public afin de réduire le risque de transmission asymptomatique ». Le Centre pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) recommande déjà clairement sur son site internet de porter des masques en tissu quand les autres types de masques ne sont pas disponibles. L’un des sénateurs de l’Etat de Pennsylvanie, Pat Toomey, a déjà réagi en incitant au port de masques faits maison.

Chaque minute compte dans la lutte contre la propagation du Covid-19, qui est aussi rapide que silencieuse. Si chacun se couvre le nez et la bouche pour protéger les autres, c’est le virus qui perd. Je suis convaincu que nous devons urgemment mettre en œuvre les solutions que nous avons à disposition. Il y a une semaine, nous avons proposé un tutoriel pour réaliser un masque en tissu facile à faire soi-même à zéro coût et nous en avons déjà distribué plus de mille exemplaires dans les quartiers sous-intégrés, appelés communément Mapanes. Si tout le monde s’y met, cela fera une différence majeure. La lutte contre le Covid-19 est une lutte collective. C’est l’affaire de chacun d’entre nous.

Afin de renforcer la sécurité de tous, je demande donc au gouvernement de généraliser le port du masque facial anti-projection obligatoire pour toutes les personnes dans l’espace public.

Afin de protéger toutes les personnes qui nous sont chères, je demande à chaque gabonais de jouer son rôle dans la lutte contre la propagation du Covid-19 et de fabriquer son masque pour se protéger et protéger les autres.

Chacun d’entre nous doit prendre la mesure de la responsabilité qui est la sienne pour empêcher la propagation du virus et protéger ses proches et ses concitoyens. Et il faut le faire aujourd’hui. Le monde a trop sous-estimé ce virus. Nous avons la chance de pouvoir tirer les leçons de l’expérience des autres. Agissons avant qu’il ne soit trop tard.

 

Gaël Koumba Ayouné

Président du Rassemblement des Jeunes Patriotes Gabonais (RJPG)

Général des Mapanes

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